(Re)programmer l’obsolescence : l’opportunité de la seconde main pour les marques

La seconde main a le vent en poupe. La preuve par les chiffres, sur les trois dernières années, le marché des vêtements d’occasion a augmenté 21 fois plus rapidement que la vente de textile de première main. Tout aussi encourageantes, les statistiques* prédisent que le marché de la fripe devrait dépasser les achats de fast-fashion en 2028. 

En consommant du vintage, par le plaisir du shopping et la quête du petit prix, les millenials ont démocratisé cette tendance (33% d’entre eux privilégient les vêtements vintage) tout en influençant les générations supérieures. Suivant l’entrée prix, ils ont fini par s’éduquer à une mode durable, circulaire et qualitative et ont contribué à l’émergence de nouveaux contenus sur les réseaux sociaux. D’un côté, les Youtubeurs expliquent comment upcycler et délivrent des conseils en tout genre pour dénicher les meilleurs articles en friperie ou sur les sites dédiés, de l’autre ce sont les «thrift flip», sortes de tutoriels pour upgradés un produit sous-évalué, qui fleurissent sur Tik Tok, ils sont visionnés puis reproduits par de plus en plus d’internautes.  L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est a16b2c5291398102d41db7ebb77d997b-1024x576.jpg.exemple de “thrift flip”

Cet essor de la seconde main, accentué par la remise en question générale sur nos modes de consommation post-COVID, a poussé certains acteurs à se positionner en tant que leader. Vinted, avec une croissance de 250% en un an, en est le meilleur exemple (la France constitue son premier marché avec 9 millions d’utilisateurs parmi les 21 au total). Pour rivaliser avec le géant lituanien Vinted, les sites spécialisés d’occasions en France soulèvent des fonds afin de s’implanter sur de nouveaux continents et séduire de nouveaux marchés.  

Par exemple, Vestiaire Collective a levé 59 millions d’euros pendant le confinement. Objectifs ? Développer sa plateforme spécialisée dans la seconde main de luxe en Corée du Sud, au Japon et doper sa croissance aux Etats-Unis.  

« Alors que nous prenons tous du recul et réfléchissons à notre mode de vie, nous sommes persuadés que les modes de consommation sont sur le point de connaître une profonde mutation, et les plateformes C2C ont un rôle important à jouer à cet égard. Nous voyons dans Vestiaire Collective un leader émergent et un catalyseur de cette évolution »
Paul Degueuse, General Partner de Korelya Capital, investisseur de Vestiaire Collective. 

Face au succès de ces marketplaces, les marques souhaitent toutefois retrouver la main mise sur leurs produits, se réapproprier leur image et assurer leur authenticité au client. En accompagnant le produit tout au long de sa vie, de sa vente à sa revente, la marque évite que la valeur ne soit captée par des tiers. Une occasion, pour elles, de démontrer la qualité et la pérennité de ses produits.

Plusieurs options possibles, soit celles-ci envisagent une intégration dans leur merchandising d’articles d’anciennes collections, soient elles peuvent le proposer en ligne aux moyens de nouveaux process. 

« Plutôt que de laisser un Vinted utiliser l’image des marques, nous proposons à celles-ci de reprendre la main sur leur relation avec leurs clients tout en optimisant le cycle de vie de leurs produits » explique Lucie Soulard, cofondatrice de Place2swap.

Né en 2016, la start up, Place2swap accompagne les marques dans la transformation de leur modèle et dans leur démarche de responsabilité. Avec une solution digitale, Place2swap connecte les enseignes avec les consommateurs de seconde main. En plein essor, Place2swap a réalisé une levée de fonds de 750 000 euros au début d’année 2020. L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Capture-d’écran-2020-09-11-à-17.17.18-1024x452.png.plateforme des petites annonces d’Amélie Pichard

Les marques premium ou de niches ont bien compris que la seconde main était un marché porteur. Pour Amélie Pichard, la seconde main est une des traductions logiques de l’engagement de sa marque. Depuis 2018, elle actualise ses « petites annonces ». Une fabuleuse astuce permettant à la fois de fidéliser sa clientèle ; chouchouter les « Pichard addict » en leur proposant des pièces collectors et de prospecter de nouvelles clientes qui accèderaient à la marque via l’occasion, moins onéreux.

Dans ce désir de prolonger le cycle de vie des produits et encourager les nouvelles initiatives plus durables, Ba&sh propose à ses clientes un service de location et une collection fabriquée à partir de chutes de tissus. La marque a communiqué sur le lancement très prochain (normalement septembre 2020) d’une nouvelle fonctionnalité permettant aux clientes de revendre automatiquement sur toutes les plateformes de revente, les articles Ba&sh qu’elles auront achetés.

Du luxe au mass market en passant par les enseignes premium, le (re)commerce n’en est qu’à ses prémices.

*(Thread up)

Crédit photo : Lauren Bamford