Les Grands Parisiens, esthétiques périphériques
Le sujet de la banlieue n’est pas nouveau. Les papiers qui se sont attelés à traiter de l’engouement esthétique pour celle-ci pourraient donner le sentiment d’en avoir déjà fait le tour. Néanmoins s’il y a trois ans, celle-ci s’invitait timidement dans les éditoriaux et les photoshoots, aujourd’hui, elle a presque envahi l’univers de la mode et du luxe, devenant un vrai phénomène de fond. Éclatant les frontières, imposant de nouveaux rapports de forces, de nouveaux contrastes, la banlieue amène du relief, de la brutalité et de la densité à des milieux qui arrivaient à court d’inspiration.
Alors oui, l’intérêt pour celle-ci n’est pas nouveau. Les architectures brutalistes, massives et imposantes de l’après-guerre en décor de fond des shoots léchés, non plus. Mais ce qu’il y a de nouveau, désormais, c’est qu’elle ne plaît plus seulement pour cette touche grinçante et irrévérente qu’elle amenait à des milieux créatifs antipodiques, mais pour ce qu’elle a à l’intérieur. Un fourmillement créatif qui en émane et qui crée du beau dans ce qui d’apparence ne répond pas aux normes archaïques de ce qui s’apparente comme tel.
ESTHÉTIQUES EN BLOCS
Longtemps vilipendée pour ses infrastructures massives, aléatoires et originales, la banlieue alimente, aujourd’hui, par ces mêmes architectures, les inspirations photographiques, vidéographiques et autres. Pour rappel, le brutalisme est un style architectural issu du modernisme. Célèbre et plutôt impopulaire dans les années 1950 et 1970, il compile toutes les constructions dites « laides », en béton, parmi lesquelles la Cité Radieuse du Corbusier, les Choux cristoliens de Gérard Grandval ou encore le centre de la danse de Pantin de Jacques Kalisz.
Le regain récent pour cette forme d’architecture a permis de révéler des pépites souvent bien cachées au fin fond des périphéries. Les utopies créatives des architectes, qui ont assigné leurs marques dans ces espaces, précèdent celles des générations actuelles. Pas désillusionnées, mais avec un rapport plus rude, plus brutal à la réalité qui génère une affinité nouvelle à la notion de beau. Le beau est ailleurs. Il n’est plus parfait. Il a du relief, des aspérités et des imperfections.
CONSTRUCTIONS BRUTES
Par ailleurs, les derniers défilés et présentations donnent le sentiment que les architectures brutalistes se sont déportées sur les catwalks pour héberger les corps. Elles nourrissent des constructions de silhouettes pensées comme des blocs, des épaules carrées, massives, des jeux d’extrêmes longueurs, rigides et des gammes de couleurs grisées, bétonnées. Des nouveaux mix entre tailoring et sportwear qui illustrent la fusion des univers, ainsi que des nouveaux it-accessoires, mieux connus comme emblèmes des banlieues (claquettes, bananes, sacoches bandoulières…).
LIFE FROM THE BLOCKS
Si les lignes architecturales inspirent, la vie qui s’y passe à l’intérieur aussi. Un réel besoin se manifeste : celui de révéler la banlieue dans tout ce qu’elle a d’optimiste, de fédérateur, de créatif et de sincère. Une volonté qui dépasse l’unique intérêt pour l’architecture. Elle va plus loin ; celle de déceler ce qui compose ces périphéries, les nouvelles énergies, synergies. Des lieux qui regorgent de trésors. Des gens qui réveillent des esthétiques, celle de la débrouille, du système D.
Une volonté de s’arrêter sur les gens, les personnalités qui y vivent. Aux vies qui s’y déploient, à celle qui se construit. À cette création qui grouille et qui excelle dans la manière de puiser des ressources dans un environnement où il y en a peu. Pour en offrir beaucoup.
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